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On oublie le dernier rêve ; on se remémore toujours le premier amour.
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21 janvier 2009

La psychanalyse (Pierre Desproges - Chronique de la haine ordinaire - 28 mars 1986)

pierre_desprogesDepuis pas loin d'un siècle qu'une baderne autrichienne obsédée s'est mise en tête qu'Oedipe voulait sauter sa mère, la psychanalyse a connu sous nos climats le même engouement que les bains de mer ou le pari mutuel urbain.

On a beau savoir pertinemment que la méthode d'investigation psychomerdique élucubrée par le pauvre Sigmund n'est pas plus une science exacte que la méthode du professeur Comédon pour perdre trente kilos par semaine tout en mangeant du cassoulet, ça ne fait rien, la psychanalyse, c'est comme la gauche ou la jupe à mi-cuisse, c'est ce qui se fait maintenant chez les gens de goût.

Ce scepticisme à l'égard de la psychanalyse, mais aussi de la psychologie et de la psychiatrie qui s'y réfèrent de plus en plus, me vient, selon mes docteurs, des données de base primaires d'un caractère brutal et non émotif qui me pousse à manger le pilon du poulet avec les doigts ou à chanter l'ouverture de Tannhâuser dans les moments orgasmiques.


Voici une histoire vécue, où le prestige des psy en prend plein le subconscient. Ma copine Betty Sartou, mère de famille à ses moments pas perdus pour tout le monde, a connu le malheur d'accoucher d'une espèce de surdoué qui s'appelle Grégoire, comme les moins cons des papes, mais c'est une coïncidence. A cinq ans et demi, ce monstre donnait des signes alarmants d'anormalité. Notamment, il préférait Haendel à Chantal Goya, il émettait des réserves sur la politique extérieure du Guatemala et, surtout, il savait lire malgré les techniques de pointe en vigueur à l'Éducation nationale.

Devant ce désastre, la maman et la maîtresse d'école estimèrent d'un commun accord que Grégoire était un mauvais exemple pour ses collègues de la maternelle, et qu'il serait bienséant de le jeter prématurément dans le cours préparatoire. Oui, mais à condition, dit l'Éducation nationale, que Grégoire subisse de la part d'un psychologue, par nous choisi, les tests en vigueur en pareille occasion. Au jour dit, mon amie Betty et son super minus se présentent au cabinet du psy, en l'occurrence une jeunesse binoclée de type " Touche pas à mon diplôme ". On prie la maman de rester dans la salle d'attente. Vingt-cinq minutes plus tard, la psychologue dont le front bouillonnant se barre d'un pli soucieux libère le gamin et accueille la mère.


- Votre fils Grégoire peut sauter une classe. Il en a la maturité. Il a parfaitement réussi les tests de latéralisation (en gros, cela signifie que si on lui présente une cuillère, il aura tendance à l'attraper plutôt avec sa main droite qu'avec son pied gauche). Malheureusement, je ne vous cacherai pas qu'il semble souffrir de troubles affectifs probablement dus à... un mauvais climat familial. Voyez le dessin qu'il vient de réaliser. Je lui avais demandé de dessiner papa et maman. C'est assez clair, non ?

L'enfant avait dessiné un père gigantesque, dont la silhouette occupait toute la hauteur de la page, alors que la mère lui arrivait à peine au plexus.
- Pour moi, c'est clair, soupira la psy. Cet enfant marque une tendance à la sublimation de l'image du père, tendance subconsciemment contrecarrée par une minimisation anormale de l'image et donc du rôle de la mère dans le contexte familial. Je ne vois malheureusement pas d'autre explication.
- Moi, j'en vois une, dit Betty. Mon mari mesure un mètre quatre-vingt-treize et moi un mètre quarante-sept.                           

Commentaire personnel :
Nous étions en 1986, je vous le rappelle, lorsque Pierre Desproges écrivit ce texte...quel précurseur, une fois de plus, car qui alors aurait pu prévoir que le mot "psy" soit autant "sanctifié", "béni", utilisé à toutes les sauces, qu'il remplisse autant les bouches (et vide les poches) de gens sérieux au demeurant, qu'il soit plus employé à tort et à travers que à bon escient de nos jours?

Et pour quels résultats? Outreau est un bel exemple, "la parole des "psys" est d'or, les accusations portées sont réelles, ces actes ignobles ont bien été commis, etc." Ah oui? Au final ce fut la plus grosse erreur judiciaire depuis l'affaire Dreyfus certainement.

Et ces derniers jours, suite aux mensonges d'un pauvre gamin, un prof se suicide."L'enfant ne ment pas" nous ressassent les psys à longueur de journaux, de magazines, d'interviews en tant qu'experts, tant dans les media que, plus grave, auprès des tribunaux.

Un car se renverse : vite une cellule psychologique! Un prof engueule un élève, non seulement il faut le virer, mais en plus il faut lui casser la gueule (vive les parents et l'enfant roi qui ne ment jamais), et surtout ne pas oublier de mettre en place une cellule psychologique!

La cellule psychologique, remède ultime aux maux d'une société toujours en recherche d'un coupable à tout et à rien, une dérive dangereuse qui provoque des dégats considérables (allez parler aux personnes qui à Outreau ont fait 3 ans de prison pour rien, allez dire à la veuve du prof qui s'est suicidé qu'il lui faut une cellule psychologique!)

En rentrant en voiture un moustique s'est malencontreusement écrasé sur mon pare-brise, je veux une cellule psychologique, au secours!

Et avez-vous entendu ou vu ou lu tous ces experts "psys" s'excuser une seule fois? Faire repentance à un seul instant? Démissionner de leurs fonctions pour incompétence notoire?
Que nenni! Jouer avec l'immatériel et l'interprétable à merci est si confortable et permet de palper tellement d'argent qu'ils ne vont pas scier la branche en or sur laquelle ils sont assis quand même, allons!

Quand on n'a vraiment aucune solution, quand on patauge alors on fait appel à un "psy" comme si Dieu en personne venait porter la bonne parole, pendant que, dans le même temps, tous ces braves gens hurlent contre les astrologues, les radiésthésistes, les voyants et autres charlatans du même accabit.

Mais parmi tous ces "charlatans" lesquels écoute-t-on le plus et prend-on la parole le plus au sérieux, lesquels font le plus de dégats?

Je vous laisse deviner...

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Commentaires
P
Je suis bien d'accord avec Fred.<br /> <br /> Il faut distinguer trois choses : la psychologie scientifique (et ses aficionados), la psychanalyse hasardeuse et réfutée (et ses partisans), et la politique du n'importe quoi exercée par des gens non compétents.<br /> <br /> Le paysage psychothérapeutique français craint : la psychanalyse a encore ici-bas une crédibilité qu'elle ne conserve à présent qu'en francophonie et dans certains pays d'Amérique du sud. Elle est ainsi encore enseignée dans la majorité des universités française... alors que depuis les années 80, le combat contre les idées fausses véhiculées par la psychanalyse fait rage, il est ici étouffé encore maintenant malgré la parution (enfin !) d'ouvrages francophones exhaustifs et populaires sur le sujet (Le livre noir de la psychanalyse, ou Le crépuscule d'une idole).<br /> <br /> Pour en revenir aux cellules d'urgence médico-psychologique, il est scientifiquement établi que leur influence est néfaste - d'autant plus dans un pays où la majorité des psychologues est mal formée.
F
Obligé de réagir à la lecture de ce type de commentaires qui sentent bon le sens commun! <br /> <br /> Je pense en fait que vous vous trompez de cible dans votre écrit!! Le problème, ou les coupables, ce ne sont pas les "psy" aussi divers soient ils! Il s'agit oar contre de la dérive qui tend à psychologiser tous les "problèmes sociaux" et à, ainsi, déplacer le questionnement du social à l'individuel! <br /> <br /> C'est, à mon sens, plutôt cette dérive que vous devriez "traiter" plutôt que produire une diabolisation (légèrement outrancière) d'un recours qui peut s'avérer utile pour un être humain!
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